Perspectives littéraires n.3 - Journal - Page 17
voir sur la page
d9accueil de son site
web26, sur sa page
Instagram27 faisant
l8objet de clichés
photographiques
(commentés ou non,
qu9ils soient mis en
scène ou faisant
mine d9être tirés de
son
expérience
quotidienne intime),
en fronton de sa
page twitter et biensûr sur la couverture du livre au programme.
Hélène Dorion. Elle n'est pas non plus tenante
de la clandestinité ou de la marginalité à l9écart
de tous circuits médiatiques ou sociaux,
comme l9ont été à des niveaux différents des
Lorand Gaspar (retiré dans le désert), Philippe
Jaccottet (avare d9interviews mais prolixe en
publications), ou Stanislas Rodanski (carrément
perdu de vue). Très curieux dosage entre la
présence et l9évanescence, qui interroge la
figure du poète, de même que la circulation et
la portée de la parole poétique.
Hélène Dorion offre l9occasion de vérifier au
plan sociologique à quelles paroles on veut
tenir (paroles savantes d9universitaires -et son
Tuvre a déjà suscité une exégèse universitaire
importante) ou parole de profanes, de lecteurs
de tous horizons qui viennent nourrir les
commentaires en ligne. Ni poète sur le Mont
Parnasse ni poète retiré du monde, ni en
surplomb ni en ermitage, Hélène Dorion joue
avec une omniprésence médiatique aussi
nouvelle (depuis l9inscription aux programmes
nationaux d9Tuvres d9EAF) que maitrisée ;
savant dosage qui invite à interroger la
représentation du poète, qui échappe ici à tous
les emplois déjà tenus : Hélène Dorion n9est ni
poète de cour, ni poète engagée, ni poète
maudite.
Le rapport au lieu (d9écriture, de parole, de
production, d9expérience) comme au temps (de
production comme de diffusion) du livre s9en
trouve bousculé, jusqu9à offrir l9opportunité de
redéfinir la poésie, non seulement à l9aune de
ces nouvelles façons de faire émerger puis
circuler les mots, les images et les sons mais
aussi à la faveur de ce repositionnement et du
lecteur et de soi, qui esquissent un lyrisme
original : public mais secret, médiatique mais
parcimonieux, en somme une introspection
négociée, où l9accessibilité ne signifie pas pour
autant le dévoiement et le gaspillage de son
intimité.
Hélène Dorion revendique sa normalité,
d9une certaine façon sa banalité, mais elle
revendique aussi une place dans la longue
histoire littéraire et culturelle et cheminer avec
Hélène Dorion, c9est se réapproprier des
trajectoires antérieures qu9elle a elle-même
arpentées ; rien qu9en poésie, c9est avoir affaire
à une constellation d9auteurs et de références
qui traversent aussi bien le temps que l9espace,
qui vont de l9Antiquité (pour les récits
cosmogoniques et catabatiques) jusqu9aux
écritures récentes d9Annie Dillard en passant
par des héritages plus conventionnels comme
Dante ou Rilke ; quant à l9espace, il couvre les
Amériques (de Silvia Baron-Supervielle à Ann
Ni poète sur le Mont Parnasse ni poète
retiré du monde, ni en surplomb ni en
ermitage, Hélène Dorion joue avec une
omniprésence médiatique
On est très loin, par exemple, des mises en
scène de soi et des captures de son intimité
familiale (non dénuées d9intentions politiques
évidemment du temps de l9exil) telles que
Victor Hugo les organise dans l9objectif
photographique de ses fils mais aussi des
Vacquerie ou de Nadar28. Rien de tel avec
26
https://helenedorion.com/
https://www.instagram.com/helene.dorion/
28
On se rappelle la rétrospective d’Orsay à ce sujet qui s’est
tenue
en
1999,
https://www.musee-
orsay.fr/fr/agenda/expositions/en-collaboration-avec-lesoleil-victor-hugo-photographies-de-lexil .
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