Perspectives littéraires n.3 - Journal - Page 28
Le parcours : « La poésie, la nature, l’amour »
Le parcours « La poésie, la nature, l9amour » repose sur un triptyque qui nous semble évident
depuis que la poésie lyrique existe. HUGO déjà, n9écrivait-il pas « La nature est pleine d9amour »
(Les chansons des rues et des bois, 1865) ? Le même HUGO lie explicitement l9amour et la nature
dans Toute la lyre (1874) :
De quoi parlait le vent ? De quoi tremblaient les
branches ?
Était-ce, en ce doux mois des nids et des pervenches,
Parce que les oiseaux couraient dans les glaïeuls,
Ou parce qu9elle et moi nous étions là tout seuls ?
Elle hésitait. Pourquoi ? Soleil, azur, rosées,
Aurore ! Nous tâchions d9aller, pleins de pensées,
Elle vers la campagne et moi vers la forêt.
Chacun de son côté tirait l9autre, et, discret,
Je la suivais d9abord, puis, à son tour docile,
Elle venait, ainsi qu9autrefois en Sicile
Faisaient Flore et Moschus, Théocrite et Lydé.
Comme elle ne m9avait jamais rien accordé,
Et j9avais peur, sentant que je m9enhardissais.
Il est certain que c9est une action étrange
D9errer dans l9ombre au point de cesser d9être un ange,
Et que l9herbe était douce, et qu9il est fabuleux
D9oser presser le bras d9une femme aux yeux bleus.
Nous nous sentions glisser vaguement sur la pente
De l9idylle où l9amour traître et divin serpente,
Et qui mène, à travers on ne sait quel jardin,
Souvent à l9enfer, mais en passant par l9éden.
Le printemps laisse faire, il permet, rien ne bouge.
Nous marchions, elle était rose, et devenait rouge,
Et je ne savais rien, tremblant de mon succès,
Sinon qu9elle pensait à ce que je pensais.
Je riais, car le mieux c9est de tâcher de rire
Pâle, je prononçais des noms, Béatrix, Dante ;
Lorsqu9on veut prendre une âme et qu9on ne sait que
Sa guimpe s9entrouvrait, et ma prunelle ardente
dire ;
Brillait, car l9amoureux contient un curieux.
J9étais le plus heureux des hommes, je souffrais.
Que la mousse est épaisse au fond des antres frais !
Viens ! dis-je& 3 Et pourquoi pas, ô bois mystérieux
Par instants un éclair jaillissait de notre âme ;
Elle balbutiait : Monsieur& et moi : Madame.
Et nous restions pensifs, muets, vaincus, vainqueurs,
Après cette clarté faite dans nos deux coeurs.
Une source disait des choses sous un saule ;
Je n9avais encor vu qu9un peu de son épaule,
Je ne sais plus comment et je ne sais plus où ;
Oh ! le profond printemps, comme cela rend fou !
L9audace des moineaux sous les feuilles obscures,
Les papillons, l9abeille en quête, les piqûres,
Les soupirs, ressemblaient à de vagues essais,
27