Perspectives littéraires n.3 - Journal - Page 33
Éthique de la nature
Il existe certes une définition biologique et
géographique de la forêt. Cette dernière est en
H. Dorion, qui se réfère dans ses Tuvres, aux
éléments, tour à tour, elle renvoie à la terre
(Dans mes forêts), à l9eau (Le bruissement d9un
DEFINITION BIOLOGIQUE ET
fleuve ; Portraits de mers), à l9air (L9étreinte des
GEOGRAPHIQUE DE LA FORET
vents & Le vent, le désordre, l9oubli ), à l9union
de la terre et de l9air (D9argile et de souffle) , ce
qui l9inscrit alors dans la réflexion posteffet un écosystème d9être vivants, animaux et
romantique (initiée par Lamartine, renouvelée
végétaux, ces derniers ayant poussé de façon
par Hugo) sur l9intimité utile, au sens de
naturelle et autonome (c9est-à-dire sans
parlante, entre la nature et l9homme.
l9intervention artificielle de l9homme humaine,
Si le Romantisme développe une vision sans plantation, donc), à la durée de vie très
magique, quasi mystique de la nature et de ses longue mais limitée (fonction des aléas
pouvoirs (dans la continuité des Romantiques climatiques etc.), et caractérisée par une
qui admettent la nature comme ne dépendant biodiversité dynamique.47
ni de la société ni de l9individualité rationnelle)
Organisation des Nations Unies pour
jusqu9à lui prêter, en s9y confrontant et en
l9alimentation et l9agriculture, la FAO donne
quelque sorte par contamination, une vertu
cette définition : du « couvert arboré »48, et
libératrice. Comme le premier, dans une
explicite la définition :
conception presque animiste, H. Dorion veut
considérer la nature comme entité autonome et
« LA FAO DEFINIT LES FORETS PRIMAIRES COMME
force extérieure qui fonctionne l9altérité : dès
ETANT DES FORETS NATURELLEMENT REGENEREES
lors, il convient à l9homme de l9apprivoiser, pour
D ’ESSENCES INDIGENES OU AUCUNE TRACE D ’ACTIVITE
ne pas dire de pactiser avec elle, afin de
HUMAINE N’EST CLAIREMENT VISIBLE ET OU LES
PROCESSUS
ECOLOGIQUES
NE
SONT
PAS
retrouver la familiarité perdue.
SENSIBLEMENT PERTURBES .
ELLES
SONT PARFOIS
DESIGNEES COMME FORETS DE PEUPLEMENT ANCIEN
OU VIEILLES FUTAIES .
La forêt, espace et paysage
Cf. le colloque qui s’est tenu à Paris III -Sorbonne
nouvelle sur la poète :
https://kathleenraine.sciencesconf.org/
47
Voir https://www.canopee-asso.org/conference-lesplantations-sont-elles-des-forets/
FORETS ONT UNE VALEUR
IRREMPLAÇABLE DE PAR LEUR BIODIVERSITE, LES
Cette dimension spirituelle et philosophique de
la forêt ne s9explique pas par le seul attrait de
la poète pour la méditation (ce que traduit
l9hommage, dans Mes forêts, à la poète parfois
qualifiée de « bardiste », Kathleen Raine46) ni
même pour la philosophie, son premier amour
et sa première carrière académiques. Cela
provient de la forêt elle-même, qui ne s9est
jamais laissé enfermer dans une définition
fonctionnelle ou utilitaire. Célébrer la forêt, est,
depuis le départ, une certaine façon
d9approcher les réalités complexes.
46
CES
VOLUMES DE CARBONE QUI Y SONT STOCKES ET LES
SERVICES ECOSYSTEMIQUES QU’ ELLES RENDENT, A
QUOI
S’AJOUTE
PATRIMONIALE.
LEUR
VALEUR
CULTURELLE
ET
»4 9
Pourtant, la forêt assume également des rôles
et des identités qui vont bien au-delà de la
première définition. Pour le documentaire Il
était une forêt (2012), notre botaniste français
fournit à Luc Jacquet une définition déjà plus
propice à la poésie en en suggérant la part
cachée :
48
https://www.fao.org/3/ca8642fr/online/ca8642fr.html#ch
apter-2_1
49
https://www.fao.org/3/ca8642fr/online/ca8642fr.html#ch
apter-2_2
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