Perspectives littéraires n.3 - Journal - Page 41
dénuement de l9hiver, ce n9est
plus le même horizon, plus le
même espace, plus le même
silence qui s9offrent à moi.
4. « Mes forêts sont le
bois usé d9une
histoire& »
5. « Mes forêts sont de
longues tiges
d9histoire& »
[&]
On ne va pas à la rencontre du
paysage, c9est lui qui nous
rejoint, comme une clairière
surgit,
lumineuse
et
inattendue, à peine espérée. »
On peut répéter à des fins pédagogiques, pour
se faire bien comprendre ; on peut répéter faute
de mieux, par lassitude ; on peut répéter par
auto-persuasion (auquel la répétition traduit en
vérité une forme d9inquiétude et réclame alors
comme un surinvestissement du réel qui
voudrait s9imposer par le martèlement), on peut
répéter pour marquer combien on tient à son
propos (en y mettant tout son cTur, de sorte
que la répétition signifie et certifie alors la
présence du sujet dans son énoncé). C9est
tantôt le locuteur, tantôt l9interlocuteur, tantôt
le message lui-même qui retire un gain de la
répétition.
UNE QUETE DE SOI VERS
SOI-MEME
La forêt initiatique
Dans les extraits ci-dessus, quand il s9agit pour
H. Dorion de « retrouver / l9éternité de nos
vies » ou de voir dans le paysage « comme une
clairière surgit, lumineuse et inattendue, à peine
espérée. », il n9est pas difficile de voir quelle
charge spirituelle l9auteure accorde au paysage,
et à la forêt. Cette dernière n9est surtout pas un
décor mais bien l9objet d9une quête de soi vers
soi-même comme le conclut la fin de Mes forêts.
La structure-même du recueil est à cet égard
significative : la récurrence litanique, par cinq
fois, d9un poème intitulé « mes forêts »
questionne la valeur de la répétition, trop à la
fois simple et sous-estimé.
Mais ce retour, gage de fidélité de la parole
poétique à son ancrage paysager, régulier pour
ne pas dire cyclique est peut-être aussi bien un
leurre car la forêt ne revient pas qu9avec la
« forêt ». Entre deux poèmes intitulés « Mes
forêts », la forêt n9est pas absente, elle se
décline par exemple tout au long de la section
« L9écore incertaine » puisqu9y apparaissent
successivement « l9arbre », « le tronc », « la
branche », « les feuilles », « l9écorce, « l9humus »,
« la cime », « le houppier », « les racines ».
1. « Mes forêts sont de
longues traînées de
temps & »
2. « Mes forêts sont un
champ silencieux & »
3. « Mes forêts sont des
bêtes qui attendent la
nuit& »
40