LMi-MAG SP avril - Flipbook - Page 18
© Bruno Levy
ENTRETIEN
Caroline CHANAVAS
DRH de Naval Group
strategic HR VP de la direction de l’industrie. Et nous
avons des DRH de sites, responsables du respect du
temps de travail, de la signature des contrats, de toutes
les obligations administratives locales et du dialogue
avec les partenaires sociaux. Au total, la DRH compte
près de 300 employés incluant les équipes de la paye et
de la médecine du travail.
Le 15 septembre 2021, vous avez reçu un coup
de massue très médiatisé lors de la résiliation
par l’Australie du « contrat du siècle ».
Une commande de 12 sous-marins à propulsion
classique avait été signée en 2019 pour un
total évalué à 35 milliards d’euros. Le projet
concernait des équipes sur place, mais aussi
à Cherbourg. Comment avez-vous géré
l’aspect RH de cet événement ?
CC : Le gouvernement australien nous a informés le
15 septembre que le contrat était résilié pour convenance.
A partir de ce moment-là, Pierre Eric Pommellet, PDG
du groupe, et tout le comité exécutif n’ont plus eu qu'une
seule idée en tête : le rebond, autant en termes d’image,
de business que d’impact pour nos collaborateurs. Près
de 1 000 employés étaient affectés au programme AFS
(NDLR. Australian future submarines), dont 350 en Australie et 650 en France. Dès le 15 septembre, j'ai demandé à mes équipes d’arrêter les recrutements de cadres
et techniciens spécialisés. Le gouvernement australien
a mis en œuvre des démarches pour les collaborateurs
australiens concernés, sur son territoire. Pour la France,
j'ai immédiatement nommé un responsable du projet
pour le repositionnement des employés concernés.
Le 16 septembre au matin, nous sommes partis à Cherbourg avec Pierre Eric Pommellet, le directeur de l’industrie, Laurent Espinasse, un de mes collègues et
moi-même. Dans la voiture, j'ai organisé une conférence
téléphonique avec l'ensemble de la communauté RH qui
avait déjà beaucoup échangé la veille de façon strictement
confidentielle. Cinquante personnes ont été mobilisées à
temps plein pour le repositionnement des collaborateurs
- des recruteurs et quelques employés RH. Nous avons
également fait intervenir immédiatement des psychologues du travail.
En un mois, nous avons rencontré tous les collaborateurs concernés par une suppression de poste. Nous
avons identifié toutes leurs compétences. Aujourd’hui,
nous avons repositionné en France quasiment 100% des
18 / Hors-série secteur public / avril 2022
DRH Naval Group, Caroline Chanavas
a changé l’organisation en 2018,
avec désormais deux axes principaux :
une DRH de proximité et une DRH
accompagnant le business.
collaborateurs concernés. En Australie, nous avons déjà
aidé les deux tiers des équipes à retrouver un nouvel
emploi. Et au fil de l’eau, en fonction des nouvelles opportunités dans le groupe, nous allons permettre à chacun de rebondir. A ce jour, personne n’a subi de rupture
de contrat et nous n’avons lancé aucun plan de sauvegarde de l’emploi. Je suis très fière du travail accompli
par les équipes de la DRH.
Avec cet épisode difficile et la pandémie
de Covid-19, avez-vous néanmoins tenu
vos objectifs de recrutement ?
CC : Oui, nous avons recruté à peu près 4500 personnes
en trois ans, jusqu’en 2021, comme prévu. Dont plus de
1 000 l’an dernier avec un solde net de 488 personnes.
En moyenne, 600 collaborateurs quittent l’entreprise
chaque année. Mais nous recrutons, car nous avons
confiance en l’avenir. Nous ne doutons pas de notre capacité à faire valoir notre excellence technique et opérationnelle, et donc à faire entrer des commandes.
En ce qui concerne les départs volontaires, nous étions
autour de 1,5% des effectifs avant 2020, et nous avons
atteint 2,2% en 2021. Est-ce que ce sont ceux qui auraient
dû partir en 2020 et qui ont repoussé leur départ ? Est-ce
lié à cette « grande démission » dont on parle beaucoup ?
Il est bien trop tôt pour l’affirmer. Il y a certainement
plusieurs facteurs déclencheurs.
Avez-vous effectué des changements dans les
processus de recrutement pour vous adapter ?