MOCI MARS-AVRIL 2021 - Magazine - Page 64
L’e-commerce par zones géographiques
Le poids du e-commerce dans le commerce total demeure faible, bien inférieur à
la moyenne mondiale, même s’il a fortement
progressé. Au Mexique, ce ratio est passé de
moins de 5 % en 2019 à 9 % en 2020 ; au Brésil
l’évolution est identique.
« La croissance est forte mais le volume
reste encore faible. Conséquence logique, le
commerce électronique a un vrai potentiel de
croissance », note Jean Girard, directeur de
BPO Solver, une société d’accompagnement
à l’international implantée à Buenos Aires, qui
va lancer dans les prochains mois « Hola Francia », un projet d’importation/distribution (BtoC
et BtoB) de produits français en Argentine, au
Chili et en Uruguay
La question qui se pose aujourd’hui est celle
de la concrétisation de ce potentiel, car le
développement de ce nouveau canal de vente
se heurte à une série d’obstacles bien réels.
Le premier est celui de l’accès à Internet.
Les moyennes nationales élevées ne doivent
pas masquer des disparités entre les territoires qui peuvent être très fortes. María Fernanda Quiñones rappelle que dans 65 % des
départements de la Colombie, le taux d’accès
à Internet des ménages ne dépasse pas 10 %.
« Ces carences empêchent la digitalisation et
l’accès de milliers de Colombiens aux opportunités offertes par le commerce électronique. »
Le principal obstacle se situe au niveau de
la logistique. La plupart des pays d’Amérique
latine n’ont pas de service postal digne de
ce nom. Pour vendre en ligne, les acteurs du
e-commerce ont dû recourir à des partenaires
extérieurs ou se doter de leur propre logistique, une tâche qui n’est pas facile compte
tenu de la grande taille des territoires. L’Argentine, par exemple, a une superficie de 2,8 millions de km2, soit quatre fois celle de la France.
Résultat, les stratégies d’e-commerce sont
déployées progressivement et privilégient dans
un premier temps les capitales et les principales villes dans chaque pays.
Des progrès dans les livraisons
et les paiements
© DR
Sébastien Yanni,
directeur général
de Soyculto.
© DR
María Fernanda
Quiñones,
présidente de
la Chambre
colombienne
de commerce
électronique.
Les e-commerçants
privilégient les grandes villes.
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LE MOCI N° 2081-2082 - mars-avril 2021
Le contrôle de sa logistique est une solution
coûteuse mais avantageuse. C’est cette option
qu’a choisie le leader du commerce électronique en Amérique latine, Mercado Libre. Cette
plateforme, née en Argentine, s’est développée
à l’échelle de l’Amérique latine, a construit ses
entrepôts et dispose de ses propres livreurs.
Quelles que soient les options retenues, les
performances se sont nettement améliorées. À
São Paulo, Daniel Topper observe une franche
amélioration des délais de livraison dans cette
grande mégalopole (12,3 millions d’habitants),
qui sont passés de 3-4 jours il y a quatre ans à
24 heures actuellement.
En matière de solutions de paiement, la
situation est très disparate d’un pays à l’autre.
Au Brésil, une nation où le taux de bancarisation est élevé (plus de 70 %), plusieurs options
de paiement coexistent, la plus utilisée étant
la carte de crédit. L’application Pix, qui vient
d’être lancée récemment par le Banco do
Brasil, permet un paiement instantané via
smartphone. Avantage supplémentaire, elle
est gratuite.
En Argentine, la moitié de la population n’a
pas de compte bancaire et l’essentiel des transactions se font en liquide. Mercado Libre a mis
en place sa propre solution : Mercado Pago,
une application sur smartphone qui a permis à
des Argentins « non bancarisés » d’avoir, pour
la première fois, un outil de paiement et d’accéder au e-commerce. Cette solution a été répliquée dans les autres pays de la région.
Le Venezuela offre un exemple similaire. La
pandémie a fait irruption dans un contexte
très dégradé. L’hyperinflation (+2 959,8 % en
2020 selon la Banque centrale) a entrainé une
quasi-disparition des espèces au profit du dollar et d’autres moyens de paiement. Dans les
entreprises, les salariés reçoivent une partie
de leurs rémunérations sous forme de bons.
Sodexo a mis en place « Talento ePass Movil »
une application qui permet de recevoir ces
bons, d’effectuer des paiements en ligne
ainsi que certaines opérations financières.
« La crise économique et la pandémie ont
accéléré les paiements à partir d’un smartphone, qui se sont massifiés », note Luis Montero, directeur général de Sodexo Venezuela.
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