MOCI NOVEMBRE 2021-n°2089 - Magazine - Page 50
Enquête : les PME et l’export
Taisne (ci-contre), directrice
de la filiale Francfort Inbound
d’Altios. « En revanche, quand
elles se lancent à l’export, les
PME allemandes mettent les
moyens (formation du personnel, compétences linguistiques, etc.) et sont souvent
mieux préparées que leurs
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concurrents français », poursuit l’experte.
De l’avis de plusieurs spécialistes interrogés pour cet article, une des forces de l’Allemagne est d’être devenue « l’usine des usines
du monde ». En réinvestissant systématiquement une partie de ses profits dans la formation, l’innovation et la modernisation de son
appareil productif, l’entreprise allemande se
démarque de ses concurrents italiens et français et trouve dans les sociétés organisatrices
de salons de puissantes machines capables
de détrôner les vitrines les plus connues dans
un secteur donné.
« ProWein de la Messe Düsseldorf est ainsi
désormais plus couru des exposants et visiteurs que Vinexpo, le salon bordelais », affirme
Jean-Christophe Gessler. Là où l’Italien fera
preuve de souplesse et d’adaptabilité, l’Allemand sera souvent convaincu que sa solution
est aboutie et cherchera une solution en
partant de cette base.
Autre différence nette,
cette fois entre Français et Allemands,
le recours à l’aide
publique n’est pas un
réflexe outre-Rhin. « Un
patron allemand pré- © DR
fèrera que ses charges soient diminuées. Et
ses fonds propres seront souvent plus solides
que ceux de son voisin français », note Michael
Scherpe (photo ci-dessus), P-dg de Messe
Frankfurt à Paris.
Le soutien à l’export s’exprime différemment
dans la patrie de Goethe. Le système de la promotion des échanges extérieurs s‘y caractérise par une répartition des tâches entre l’État
et les entreprises. Afin de soutenir le mieux
possible les exportateurs, les différentes institutions, telles que les chambres de commerce
étrangères et leurs représentations à l’étran50
LE MOCI N° 2089 - novembre 2021
ger, la Germany Trade and Invest (GTAI) et bien
d’autres structures travaillent étroitement
ensemble.
Les associations professionnelles très bien
représentées au niveau fédéral ont toutes des
antennes locales dans les différents Länder.
« Afin de promouvoir les échanges extérieurs,
le pays participe à des expositions et salons
spécialisés à l’étranger qu’elle a elle-même
sélectionnés. L’État fédéral prend ainsi en
charge une partie des coûts dans le cadre
d’expositions communes des sociétés », rappelle Murielle Taisne.
Une nouvelle génération d’entrepreneurs
plus orientés export en France
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François Lamotte (ci-dessous), directeur associé d’Altios France, se veut rassurant concernant le potentiel des entreprises hexagonales à l’export.
« Je vois monter une nouvelle
génération de dirigeants
qui ont une conscience plus
stratégique de l’international.
Ils sont à l’aise avec la transformation digitale et n’hésitent pas à toquer à la porte
de fonds d’investissement
pour booster la croissance de leur société »,
observe-t-il en évoquant ces « mid-caps »
qui réalisent entre 5 et 20 millions d’euros de
chiffre d’affaires et ont une vraie capacité d’accélérer à l’international par des opérations de
croissance externe.
Au demeurant, la France offre un environnement très propice en termes de soutien à
l’export et d’aides publiques. Le ratio coûts de
gestion/primes pratiqué par Bpifrance Assurance Export est par exemple l’un des plus
faibles de l’OCDE. Il est d’environ 7 %, contre
14 % pour Euler Hermès en Allemagne, 12 %
pour la SACE en Italie.
En revanche, certaines bonnes pratiques
ont encore du mal à prendre racine largement.
Le capitalisme en réseau, où le grand groupe
emmène le sous-traitant avec lui à l’international en tant que partenaire, n’est pas encore
un réflexe aussi répandu dans l’Hexagone qu’il
l’est outre-Rhin ou de l’autre côté des Alpes. Le
patron de PME ou d’ETI français se sent ainsi encore souvent isolé face à une montagne
dont le nom est export.
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